Contourner les résistances avec les adolescents

La démarche un peu lasse, les « je sais pas » ou « ouais » toutes les 2 phrases, les yeux qui montent vers le ciel ou le regard jeté vers moi en douce dès que son parent pointe un truc qui ne va pas lors de la première rencontre… Bienvenue dans l’accompagnement des ados.

Ok ce n’est pas toujours comme ça… mais, très souvent, j’observe une telle différence d’énergie entre le parent qui s’affaire dans tous les sens parce que « rien ne va plus » et qu' »il faut trouver une solution » et l’ado qui semble presqu’étranger à ce qui est en train de se dire que ça peut vite être déroutant.

Alors j’écoute. Le parent d’abord. Qui vient avec sa souffrance et qui généralement est à l’initiative du rendez-vous.

Et puis j’observe son enfant.

Cet ado engoncé dans sa doudoune qui s’écarte avec vigueur dès que sa maman tend le bras pour lui suggérer de l’enlever.

J’écoute le récit du parent qui décrit sa réalité et j’observe, directement ou en vision périphérique si je sens que mon regard pourrait être intrusif, le jeune qui écoute ce qui se dit de lui.

Parfois, j’interviens. je coupe le parent dans son discours et je questionne le jeune: « qu’est ce que tu en penses toi de tout ça? » et il se passe tant de choses sur cette simple question!

Le regard se relève, un petit sourire s’esquisse parfois et on perçoit déjà en quelques secondes, le crédit qu’il accorde (ou non) à ce qui vient d’être dit de lui.

 

Contourner les résistances, c’est déjà penser qu’il pourrait y en avoir.

J’ai envie de dire qu’il y en a toujours en fait :)

Même pour celui ou celle qui vient avec beaucoup de motivation pour changer. Parce que changer, même quand on en a envie, ça peut faire flipper parce que ça signifie qu’on va laisser une part de soi, de ce fonctionnement qu’on connait si bien, derrière nous.

Alors oui. Je pars de ce principe là avec l’idée que les résistances peuvent être aussi minimes que gigantesques.

 

Le point commun?

C’est qu’avec les adolescents, j’essaie de calibrer très vite leur envie d’être là (avant même de savoir s’ils ont envie de changer quelque chose) et je m’attache à pointer ce qui aurait pu déjà générer de la résistance à leur présence ici.

  • Devoir se lever pendant les vacances plutôt que de faire la grasse matinée pour venir au cabinet,
  • savoir qu’il devra terminer ses devoirs super tard parce qu’il est venu après le collège, seul créneau disponible,
  • venir pour répondre à l’ultimatum posé par les parents pour que quelque chose change à la maison… peu importe.

    Mais si je repère un truc comme ça (ou si je pense qu’il y a un truc de cet ordre), je le pointe.

Si je tape juste, je marque un point « tiens, elle s’intéresse à la part de moi qui est venue en trainant des pied. Elle n’est pas juste cette adulte de plus qui veut que je change mon comportement ».

 

Si je suis à côté, ce n’est pas grave. Je le vois aussi et ça me permet de partir sur autre chose.

Rejoindre, Accompagner, Conduire. Je pense que c’est Philippe Miras que j’ai entendu poser ces principes dans cet ordre-là.

Et c’est la base je trouve pour accompagner.

Rejoindre déjà l’autre là où il est.

 

Quand on veut aller direct vers « ok j’ai des outils pour te conduire vers le changement« , ça ne marche pas. Parce que l’autre n’est pas prêt, n’a pas envie, ne nous fait pas confiance, ne va certainement pas y aller pour nous faire plaisir (ou bien ira mais reviendra en arrière parce que ça n’aura pas été choisi).

Accompagner les ados et leurs parents pourrait sembler plus inconfortable que les petits et en même temps, à l’adolescence, les jeunes parviennent souvent davantage à mettre en évidence le décalage de la demande. Là où avec les plus petits, on va chercher à s’assurer que la demande du parent ne soit pas à côté de celle de l’enfant, l’adolescent lui, nous amène souventsur un plateau ce décalage.

À nous de savoir en faire quelque chose et de poursuivre la séance sur le même mode. Ecouter, s’adapter, proposer, tester, réajuster.

Et quand on porte attention à ces détails des premières minutes lors de la rencontre, on se facilite grandement les choses pour la suite de la séance.

Ensuite, il y a les résistances éventuelles liées à la pratique de l’hypnose par exemple. Certains rentreront vite dans ce qu’on propose et comprendront vite l’intérêt. D’autres, seront plus sceptiques voire même, vont vraiment attendre de voir si on est solide avant de s’autoriser à vivre l’expérience qu’on propose.

 

Il y a quelques temps, j’ai reçu un ado qui s’attendait à faire de l’hypnose de spectacle et qui ne pouvait donc pas imaginer que ce qu’on allait faire puisse lui être utile, que ce soit sérieux.

Alors on est partis de là. J’ai écouté tout ce qu’il imaginait et on a joué avec l’hypnose, comme ça, pour tester. Pour voir déjà s’il me suivait.

L’accompagnement entier peut se jouer sur notre capacité à aller à son rythme, à se défaire du résultat qu’attendent les parents. Parce que l’attention qu’on va porter à la qualité de la relation, à ce qui est possible ou pas pour lui, lui donnera (ou pas) le « go » intérieur pour s’autoriser à avancer et à rentrer petit à petit dans ce qu’on propose.

Et c’est aussi cette relation là qui permettra qu’on puisse utiliser la provocation par exemple (très utile avec les adolescents), qu’on puisse créer des recadrage puissants avec un signaling et aller encore plus loin dans la connaissance de lui-même.

Comment ça se passe pour vous dans vos séances avec les adolescents?

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