Il arrive parfois que nous recevions des enfants qui semblent être moins embarqués par leur imaginaire, moins enclins en tout cas à se laisser porter par le côté magique que peut amener l’hypnose en séance.
En parallèle, et notamment avec les ados qui peuvent vite tester le cadre, notre solidité et notre capacité à réellement leur faire vivre un truc qui change, passer par les phénomène hypnotiques peut être un bon moyen de créer du lien, amener de la magie et ouvrir une brèche pour que l’accompagnement prenne tout son sens pour lui.
Le premier truc que j’ai envie de partager et que que je redis régulièrement, c’est qu’en effet, proposer des phénomènes hypnotiques dès le début de la rencontre permet entre autres de mobiliser et de créer de l’engagement.
Dès lors, comment faire avec ceux qui semblent ne pas accrocher à nos propositions pour ne pas se retrouver à se demander quoi faire (ou comment le faire) et pour que l’enfant ou l’ado qui vient vous voir vive une chouette séance?
Sortir du faire
Arrêter de vouloir faire de l’hypnose. Je crois que ça part de là. Parce qu’on met trop d’espoirs, d’envies de projections de résultats sur cette hypnose qu’on veut absolument faire vivre à l’autre, sur ce phénomène hypnotique dont on a appris qu’il était hyper utile pour se débarrasser d’un problème.
Faire, c’est bien et c’est important de proposer des trucs en séances. Mais faire, c’est (trop) souvent ce qui vient recouvrir la relation, ce qui empêche de prendre le temps de se connecter à l’autre.
Alors souvent on me répond « ah mais si si, je sais très bien créer le lien avec les enfants, ça se passe bien, ils me font confiance. » Déjà, la notion de « nous faire confiance » serait probablement à définir mais surtout, qu’est ce que vous mettez derrière créer le lien?
Quand j’apprenais le métier d’éducatrice, on m’a appris qu’il fallait créer du lien certes, mais attention. Pas trop près. Pas trop dans l’affect. Un lien derrière le masque et sous la casquette de la professionnelle que j’étais. Un truc bien barricadé qui empêchait justement de créer ce lien. Celui d’humain à humain. Celui qui dit « je te vois« .
Celui qui suppose aussi qu’on puisse se laisser voir. Je vous pose la question en passant « qu’est ce que vous laissez voir de vous lorsque vous accompagnez« ?
Alors oui, ça demande d’être très très au clair avec la place depuis laquelle on le fait (d’où l’importance d’être supervisé/accompagné dans sa pratique pour ne pas se perdre dans les méandres relationnels inhérents à tout cadre thérapeutique).
Mais ce lien-là, celui qui nous permet de prendre le temps d’accueillir l’autre là où il est, il change tout*.
La curiosité comme meilleur atout
L’enfant qui vient vous voir ne sait généralement pas ce que vous allez lui proposer, ce qu’est un phénomène hypnotique et encore moins à quoi ça va lui servir.
Rappelez-vous déjà de ça quand votre petite voix vous dira « oh la la, et si ça ne fonctionne pas? ça craint, c’est la fille de l’épicier, si je me plante je vais avoir un bouche-à-oreille de merde« . Mouais… Ne me dites pas que vous ne vous êtes jamais dit ça, je ne vous croirai pas…
Donc l’enfant qui vient vous voir n’a généralement pas d’attentes concernant l’hypnose contrairement à vous.
J’ai dit concernant l’hypnose.
Parce que oui, peut-être qu’il a vraiment envie d’arrêter de sucer son pouce pour pouvoir enfin aller à la soirée pyjama qu’il attend depuis si longtemps mais qu’il repousse de peur qu’on se moque de lui.
Donc oui il a une attente. Mais il ne se dit certainement pas « bon j’espère qu’il.elle va trouver le bon protocole pour mon problème, que je vais vivre un truc complètement ouf en oubliant mon prénom et en ayant l’impression que mes mains volent toute seules« .
Non l’enfant ou l’ado qui vient vous voir ne se dit pas ça.
Il se dit plein d’autres trucs qui pourraient faire l’objet d’un autre article mais il ne se dit pas ça.
Alors vous qui êtes en train de vous demander ce que vous allez bien pouvoir faire en hypnose, rappelez-vous de ça lors de votre prochaine séance.
Au fond, l’hypnose c’est quoi?
Ouch, je m’embarque ici sur un terrain glissant au regard de toutes les définitions qui existent…
Mais disons pour faire simple que c’est un état de conscience différent de son état de conscience habituel, qui permet à la (ou les) part.s de nous-même qui crée.nt des comportements gênants qu’on ne semble pas avoir décidés consciemment de s’exprimer autrement pour générer de nouveaux comportements plus appropriés.
Ça vous va comme définition? je l’explique souvent comme ça d’ailleurs. Pas besoin de faire compliqué (et ça pourrait même être encore plus simple mais vous avez compris l’idée).
En gros, si je me ronge les ongles et que ça m’ennuie, l’hypnose va me permettre de mobiliser la part de moi dont je n’ai pas conscience (à qui je n’ai rien demandé en fait) qui a mis en place ce comportement un jour pour voir si elle ne pourrait pas faire autrement (parce qu’entre le moment où j’ai commencé à le faire et aujourd’hui, je ne suis plus tout à fait la même personne, j’ai évolué et j’ai des ressources aujourd’hui qui vont me permettre de faire autrement).
Revenons aux phénomènes hypnotiques donc :)
L’hypnose permet donc (et surtout avec les enfants), d’aller explorer leur fonctionnement, de voir comment chaque partie s’organise à l’intérieur de lui, de voyager au coeur de ses émotions, de discuter avec le truc qui l’embête et de faire appel à tout un tas de trucs dont lui seul a connaissance pour transformer tout ça.
Quand on se souvient de ça, qu’on accompagne un enfant ou un ado, on va donc partir de LUI.
Parce que c’est la clé. Partir de qui il est, de comment il fonctionne, de comment il fait pour avoir son problème.
On peut tout à fait proposer de tester ensemble quelque chose comme une expérience sans enjeu lié au problème, et en fonction de ce qui se passe, poser des questions.
Mais pas en mode « je pose des questions parce que je veux réussir mon phénomène hypnotique » hein!
Sur le chemin de la connaissance de soi
Être curieux de découvrir son fonctionnement et le faire avec lui.
Rien que ça, c’est une sacrée expérience que de s’engager sur le chemin de la connaissance de soi par l’exploration de son fonctionnement. Chez les ados, c’est inconsciemment leur dire aussi combien ils sont uniques dans cette période où ils ont autant besoin d’identification aux pairs qu’ils vivent parfois mal cette comparaison.
C’est ouvrir une petite porte sur leur unicité et les accompagner à (se) découvrir leur propre fonctionnement. C’est déjà très hypnotique parce que très vite, vous allez poser des questions qui invitent à l’introspection.
Et chez les plus petits, utilisez des supports (dessins, cartes, bouchons…) pour leur permettre de soutenir leur capacité d’abstraction avec de la manipulation concrète.
En prenant ce temps-là, vous aurez tellement d’infos précieuses pour la suite que vous pourrez justement utiliser pour proposer des phénomènes hypnotiques plus « visibles » par la suite.
Parce qu’une fois que vous saurez ce qui fonctionne avec cet enfant-là (et ce qui ne fonctionne pas) vous pourrez vous ajuster dans ce que vous lui proposer et lui pourra percevoir concrètement ce qui change à mesure qu’il arrive davantage à se connecter à son corps par exemple.
On pourrait même aller jusqu’à dire que l’exercice en lui-même qui consiste à découvrir avec l’enfant ou l’adolescent, comment il fonctionne, est en lui-même un protocole d’hypnose. En l’accompagnant à se (re)connecter à ses ressentis, à détecter ce qui l’impact au niveau de ses pensées, de ses croyances… vous l’accompagnerez justement à sentir et percevoir concrètement combien il avance par rapport à ce pourquoi il est venu.
Mais gardons-en tête quand même que créer des phénomènes hypnotiques n’est pas une fin en soi. Faire de l’hypnose doit être au service d’un accompagnement plus global qui part de l’enfant qu’on accompagne.
Oui ça parait évident écrit comme ça. Mais combien d’entre-nous reviennent systématiquement dans ce travers qui nous pousse à vouloir faire un truc pour que l’autre aille mieux?
La pratique et l’expérience permettent de mettre le doigt dessus de mieux en mieux et se réajuster de plus en plus la plupart du temps.
Mais si vous n’aviez aucune pression en termes de nombre de séances et de résultats, qu’est ce que ça changerait pour vous avec ces enfants et ces ados qui ne rentrent justement pas facilement dans ce que vous avez l’habitude de proposer comme phénomènes hypnotiques?
Si tu veux apprendre à être à l’aise avec les phénomènes hypnotiques dans chacune de tes séances, tu peux aller voir par ici pour acquérir dès maintenant et tester dès la prochaine séance de nombreux outils que tu pourras adapter quel que soit l’âge ou la problématique de l’enfant que tu accompagnes.
*Merci à Philippe Gaberan, mon premier mentor qui m’a montré combien les petits « riens » faisaient tout dans la relation.